Petites histoires pour mieux aborder les problèmes du système éducatifs
L'école de la Forêt
«Un jour, les animaux décidèrent de faire quelque chose pour résoudre les problèmes du monde moderne. Pour cela, ils organisèrent des élections et nommèrent un ours, un blaireau et un castor membres de la Commission d’enseignement. Un hérisson fut engagé comme professeur. Le programme scolaire consistait à courir, grimper, nager et voler; afin de faciliter l’enseignement, l’on décida que toutes ces disciplines seraient obligatoires.
Le canard battait tout le monde à la nage, même son professeur; mais il était très médiocre quand il s’agissait de voler et complètement nul à la course. C’était un si mauvais élève qu’on décida de lui donner des leçons particulières: il devait courir pendant que les autres allaient nager. Mais cet entraînement meurtrit tellement ses pieds palmés qu’il obtint à peine la moyenne à l’examen de natation.
L’écureuil grimpait mieux que quiconque; en escalade, il avait toujours 18 sur 20, la meilleure note. Voler, par contre, lui déplaisait profondément car le professeur exigeait qu’il sautât du haut de la colline, alors que lui préférait s’élancer de la cime des arbres. Il se surmena tant qu’au bout d’un certain temps il n’obtint plus que 8 en escalade et 6 à la course.
L’aigle était une forte tête que l’on punissait très souvent. Il éclipsait tous les autres quand il fallait grimper aux arbres, mais ne voulait utiliser que sa propre méthode. On décida donc de le mettre dans une classe d’observation.
Le lapin était avant tout le champion de la course à pied, mais les heures supplémentaires qu'on lui fit faire à la piscine finirent par lui donner une dépression nerveuse.
À la fin de l'année scolaire, une anguille prodige (médaille d'or de natation, elle savait aussi grimper, courir et même un peu voler) obtint la meilleure moyenne dans toutes les disciplines. Elle fut donc désignée pour prononcer le discours de fin d'année lors de la distribution des prix.
La taupe ne put aller en classe: creuser des galeries ne figurait pas au programme scolaire. Elle n'eut donc d'autre choix que d'envoyer ses enfants en apprentissage chez le blaireau. Plus tard, ils s'associèrent avec les sangliers pour fonder une école privée, et celle-ci eut beaucoup de succès.
Mais l'école de la forêt qui était censée résoudre les problèmes du monde moderne dut fermer ses portes, au grand soulagement de tous les animaux.»
Cette fable de Jean Marie Ketele (Conférence à l'université de Louvain en 1983), fait écho à la citation d'Albert Einstein « Tout le monde est un géni. Mais si l'on juge un poisson sur sa capacité à grimper à un arbre, il passera sa vie à croire qu’il est stupide. »
J.M Ketele et Albert Einstein mettent en scène la métaphore d'une attente spécifique et unique de la part d'une société envers l'ensemble de sa population. Le problème qui se pose alors est le suivant : chaque individu est unique avec des capacités qui lui sont propres, alors comment pourrions-nous avoir des attentes communes envers chacun d'entre eux ?
Nous sommes ainsi amené à nous interroger sur la pertinence d'un “programme commun” dans nos école française, sachant que chaque être humain a des traits originaux qui le distinguent des autres. Comme l'indique Marguerite Yourcenar, dans les Mémoires d’Hadrien: « Notre grande erreur est d’essayer d’obtenir de chacun en particulier les vertus qu’il n’a pas, et de négliger de cultiver celles qu’il possède. »
Le maître d’hôtel
A travers cette B.D provenant du livre d'Idriss Aberkane « Libérez votre cerveau », nous constatons que l'erreur si souvent faite est celle de vouloir « gaver » les enfants de connaissances. Cette erreur ne vient pas d'une malveillance de notre part, comme cela semble être le cas du maître d'hôtel, mais plutôt d'une inquiétude vis à vis du monde extérieur, si bien que nous ne pouvons consentir à laisser partir vers lui nos jeunes générations sans les avoir préparées et re-préparées en vue de la perfection, et sans les avoir habillées d'une foultitude de savoirs. Nous ne nous demandons pas si ces savoirs peuvent être utiles mais nous voulons qu'ils les vêtent. Notre système éducatif nous pousse à aller toujours trop loin d'avance.
Cette inquiétude doit disparaître et faire place à la confiance. Confiance envers nous et surtout envers nos enfants qui savent très bien se nourrir de ce dont ils ont besoin. Ne l'ont-t-ils pas déjà si habillement fait durant leurs trois premières années de vie ? N'ont-t-ils pas appris à marcher et parler « tout seul », sans que nous leur imposions quoi que ce soit, ni que nous leur dictions la manière dont ses différents savoirs devaient être acquis ?